Ma démarche est très instinctive et je laisse mes sens me guider. Comme dans une interprétation musicale, je cherche un phrasé, une tonalité, un rythme, des dissonances, des silences, des nuances … Ma partition n’est pas écrite, j’ai des mélodies plastiques dans ma tête plus ou moins connues et reconnues, que j’écris et réécris dans le temps, suivant mes humeurs et intentions du moment.
Le hasard a sa place avec ses surprises fondatrices indispensables, mon tempérament par « une reprise en main » restructure l’ensemble pour repartir.
Le papier Yupo me laisse une autre palette à explorer, c’est dans ce nouveau jeu de hasard que mon protocole s’enrichit et se précise. Je me suis amusée à réunir un ensemble de dessins autonomes pour une composition globale finale. Un tout supérieur à la somme des parties … comme pour les duos, trios, quatuors et autres formations musicales en musique de chambre. Une découverte plastique qui vient en écho à l’inconscient pour donner de l’énergie à l’exploration.
« On ne se baigne jamais deux fois dans le même fleuve »
Héraclite
L’artiste s’inquiète souvent de la répétition, de la routine, du piétinement, de la mécanique des mêmes gestes, soucieux de ne pas s’installer dans la création d’un art dénué de sens, stérile.
Et pourtant c’est dans la répétition de l’action que l’artiste cherche à faire renaître l’espoir d’un chemin débridé, souvent négligé, obscur pour approfondir sa relation avec lui-même et sa relation avec les autres.
« L’acte est vierge, même répété » avec cet aphorisme de René CHAR tiré des « Feuillets d’Hypnos », gardons en alerte notre envie artistique.
« Mes souvenirs »
Extrait d’un texte de Georges Sand
Vous savez comment Maurice me prépare mes dendrites ; Il écrase entre deux cartons bristol des couleurs à l’aquarelle. Cet écrasement produit des nervures parfois curieuses.
Mon imagination aidant, j’y vois des bois, des forêts ou des lacs, et j’accentue ces formes vagues produites par le hasard. Mais je me trouve parfois embarrassée : c’est ce qui m’arrive en ce moment …
Il ne suffit pas de regarder la nature, il faut savoir l’apprécier, apprendre à l’admirer dans ses moindres détails. Celui qui se contente de voir les papillons voler dans l’air ne peut admirer les couleurs si finement diaprées de leurs ailes. Il en est de même des fleurs ou des pierres, et même des étoiles. Quand on est ignorant, voyez-vous, on ne sait pas regarder. Apprenez, et vous découvrirez dans les choses qui vous entourent mille beautés inconnues. Alors, vous éprouverez des joies que vous ne soupçonnez pas. Ce ne sont pas des mots, des noms qu’il faut vous mettre dans la tête, mais des règles générales qui vous guideront à travers vos études …